Élections régionales et départementales : il sera possible de ne pas dédoubler les bureaux de vote
Maire-info - Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du vendredi 5 février 2021
Un décret paru ce matin modifie le Code électoral pour permettre, en cas de scrutins concomitants, de mutualiser certains membres des bureaux de vote : il sera donc possible, sous certaines conditions, de ne pas avoir besoin de deux présidents et de deux secrétaires dès les élections régionales et départementales prévues en juin.
Un bon nombre de maires vont pousser un soupir de soulagement en découvrant le décret paru ce matin au Journal officiel : beaucoup s’inquiétaient fortement, en effet, à l’idée de devoir constituer dans chaque lieu de vote deux bureaux de vote entièrement différenciés, un pour les élections départementales et un pour les régionales.
La situation antérieure
Le Code électoral (article R42) indiquait en effet que pour chaque scrutin, un bureau devait être constitué, composé d’un président, deux assesseurs et un secrétaire. On sait qu’à chaque élection, les maires ont souvent de grandes difficultés à trouver suffisamment de volontaires pour constituer les bureaux, mais cette fois, les difficultés auraient été multipliées : d’abord par le fait qu’il y a deux élections au lieu d’une le même jour ; et ensuite parce que l’épidémie, qui ne sera hélas probablement pas derrière nous en juin, n’incitera pas les électeurs à se porter volontaires.
Une autre difficulté se profile : mesures sanitaires obligent, tous les lieux de vote habituel ne pourront être utilisés pour ces scrutins. Les préfets vont donc désigner de nouveaux lieux de vote, dont le ministère de l’Intérieur assure, selon nos informations, qu’ils seront communiqués aux maires « avant le début de la campagne électorale ».
Pour certains maires, l’organisation de ces scrutins risquait donc de virer au cauchemar, au point de se demander s’ils seraient en mesure de pouvoir l’assurer.
Mutualisation dans les bureaux
Le ministère de l’Intérieur a donc résolu le problème, et de façon pérenne de surcroît, en publiant dès à présent un décret modifiant le Code électoral. En effet, il a souhaité rassurer très rapidement les élus sur les mesures d’allégement de l’organisation de ce double scrutin, sans attendre la publication, sans doute tardive, de la circulaire
Certes, l’information ne saute pas aux yeux en parcourant le Journal officiel, puisque cette modification importante se cache dans un décret essentiellement consacré à « l’application de l'article 10 de l'ordonnance n° 2020-1304 du 28 octobre 2020 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la création de la Collectivité européenne d'Alsace » ! Mais qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse – les mesures attendues figurent bien à l’article 3 du décret : « Lorsque deux scrutins se tiennent concomitamment, une même personne peut exercer les fonctions de président des deux bureaux de vote prévus pour chacun de ces scrutins lorsque les opérations électorales se déroulent dans la même salle et que celle-ci a été aménagée pour éviter tout risque de confusion dans l'esprit des électeurs. »
Si les maires font ce choix, il y aura donc bien, naturellement, deux bureaux de vote, mais un seul président et un seul secrétaire. Concrètement, on peut imaginer une salle où les tables présentant les bulletins de vote seraient disposées de chaque côté, et le bureau installé au milieu, avec deux urnes (les enveloppes mises à disposition par l’État seront de couleur différente pour les deux scrutins). Il devrait également (même si cela ne figure pas dans le décret) être possible de mutualiser les isoloirs pour les deux scrutins.
Mieux encore : dans les communes équipées de machines à voter, c’est l’ensemble du bureau de vote qui pourra être commun aux deux scrutins, c’est-à-dire, y compris, les assesseurs.
Un détail à noter concernant les assesseurs, qui n’a rien à voir avec le double scrutin : la règle change en matière de choix d’office des assesseurs. Jusqu’à présent, s’il manquait des assesseurs le jour du scrutin, le président devait désigner les assesseurs manquants « parmi les électeurs présents (…) selon l’ordre de priorité suivant : l’électeur le plus âgé, puis l’électeur le plus jeune ». Désormais, cet ordre sera inversé, l’électeur le plus jeune devant être choisi en priorité.
Seulement une semaine d’écart entre les deux tours
Rappelons que la date de ces scrutins n’est toujours pas connue, puisque le gouvernement tient sur sa position, lors du débat actuel au Parlement sur le projet de loi reportant ces élections : le Parlement fixe le mois, le gouvernement fixe le jour. Tant que le projet de loi n’est pas adopté, on ne connaîtra donc pas la date des deux tours de scrutin : 6 et 13 juin, 13 et 20 juin ? Il semble seulement y avoir un relatif consensus pour éviter le binôme 20 et 27 juin, cette dernière date, très tardive, se télescopant avec les premiers départs en vacances.
En revanche aucun parlementaire, lors de la navette, n’a soulevé le problème de l’écart entre le premier et le second tour, fixé par la loi à une semaine (article L56 du Code électoral).
Cet écart, dans le contexte sanitaire particulier, va poser des problèmes logistiques très sérieux au ministère de l’Intérieur. Les candidatures au second tour doivent être déposées au plus tard le mardi suivant le premier tour à 18 heures ; il faut ensuite imprimer le matériel électoral. Au final, il ne restera qu’à peine 48 heures aux services de l’État pour acheminer le matériel des deux scrutins vers les bureaux de vote, ce qui est extrêmement complexe, sans compter l’expédition de ce matériel par La Poste (ou par Adrexo dans 7 régions*) au domicile des électeurs, qui relève de l’exploit dans des délais aussi resserrés.
Le débat sur le projet de loi de report des élections aurait pu permettre de modifier la loi sur ce point, mais cela n’a pas été le cas. Les deux tours auront donc bien lieu à une semaine d’écart.
Franck Lemarc
* Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Centre-Val-de-Loire, Grand Est, Hauts-de-France, Normandie et Pays-de-la-Loire.